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Depuis la rédaction de cet article, les grévistes ont eu gain de cause sur une partie de leurs revendications. Cependant, Spencer n'a pas été réintégrée. Une procédure judiciaire sera engagée afin de revenir sur ce licenciement abusif.

Le jeudi 15 février 2024, les salariés de la librairie d’occasion Boulinier, à Saint-Michel (Paris) se sont mis en grève. Leur revendication est claire : le respect des droits des salariés, qui sont bafoués par la direction de cette entreprise « familiale ». A quoi s’est ajouté le licenciement de Spencer, une salariée que Révolution a rencontrée le 16 février. 

Licenciement abusif 

« Ce licenciement est celui de trop ! », affirment les salariés en grève dans un communiqué. Six jours après un entretien avec Spencer, la direction l’a licenciée sur des motifs arbitraires : « Le fait exact qui est signalé, dans mon licenciement, est un désaccord avec un client :  il me demandait une réduction que je n’étais pas autorisée à lui faire. Mais sous prétexte que ce client est connu depuis plus de 40 ans et qu’il a les numéros des patrons, la direction considère qu’il est plus légitime que moi dans ses revendications, et qu’il est donc justifié de me licencier. » Ce client avait déjà eu des comportements véhéments envers d’autres salariés. En prenant une sanction lourde et abusive, la direction manifeste son mépris envers le personnel.

Les procédures disciplinaires abusives sont fréquentes, chez Boulinier. Sur la base de « faits » inexistants, les salariés subissent des pressions sous la forme des convocations et d’avertissements. La direction n’écoute jamais ce qu’ils essayent de lui dire : « A aucun moment on ne se sent libres de finir nos phrases »,  explique Spencer.

Vidéosurveillance 

Les salariés sont « vidéo-surveillés » de manière permanente par la direction, et ce depuis des années, alors que ce procédé est parfaitement illégal. « Ça n’est pas une technique qui a été utilisée dans ma situation, mais elle l’a été pour des collègues qui ont subi la même pression professionnelle et un harcèlement au quotidien. On leur a reproché certains faits à partir de la vidéosurveillance. Or cette technique est illégale. C’est censé nous protéger et pas nous fliquer », explique Spencer.

Les salariés réclament le respect de la loi et l’arrêt immédiat des sanctions injustifiées. La direction s’est d’abord engagée à satisfaire ces revendications, mais dans les faits les problèmes ont continué, ce qui a poussé les salariés à tenir un piquet de grève devant le magasin du boulevard Saint-Michel.

Remarques sexistes et homophobes

Il arrive régulièrement que des clients tiennent des propos sexistes et homophobes, nous explique Spencer. « Et lorsque nous les signalons à la hiérarchie, elle nous répond que nous devons rester tolérants, courtois, et ne pas le prendre personnellement. C’est précisément la phrase qu’on nous répète régulièrement : "Il ne faut pas le prendre personnellement". Comme si c’était possible ! Car enfin, c’est nous qui sommes personnellement insultées. »

Pour ne pas froisser les clients (qui « est roi »), la direction manque à ses obligations et refuse de prendre les mesures nécessaires pour protéger ses employés. Pourtant, Loïse Boulinier, directrice générale déléguée de Boulinier, affirmait en 2022, sur BFMTV, que « le but [pour les clients] est de venir en boutique dans des véritables lieux de vie, d’échanger. Il y a une ambiance chez nous qu’il n’y a pas ailleurs. » En réalité, l’« ambiance » actuelle à Boulinier est celle du flicage, des propos désobligeants des clients à l’égard des salariés, mais aussi des sanctions disciplinaires abusives et répétitives.

Solidarité

« On est quand même assez solidaires », souligne Spencer. « Aujourd’hui [le 16 février] il y a douze salariés sur vingt-cinq présents sur le piquet de grève. Mais hier, c’était 80 % de l’effectif en grève, et on reçoit énormément de soutien des clients qui passent et échangent avec nous. »

Les salariés en grève revendiquent une prévention et une lutte effective contre les comportements discriminatoires et à caractère sexuel au sein de l’entreprise. Ils demandent l’arrêt de la vidéosurveillance du personnel et l’arrêt de toutes les sanctions disciplinaires abusives. Et enfin, ils demandent la réintégration de Spencer et la levée de toutes les sanctions arbitraires. Une cagnotte en soutien aux travailleurs en grève a été ouverte. 

« Il y a des vies en jeu, il y a des situations en jeu, moi je ne peux pas me permettre de perdre mon travail, et ce n’est pas justifié pour mes collègues qui font très bien leur travail qu’ils aient des avertissements à tue-tête sans raison valable », conclue Spencer.

 

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