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Le 24 septembre dernier, la direction de Total annonçait aux salariés de la raffinerie de Grandpuits, en Seine-et-Marne, l’arrêt du raffinage de pétrole sur le site dès le premier trimestre de 2021. Le dépôt associé de Gargenville, dans les Yvelines, serait aussi concerné à partir de 2023.

Le géant pétrolier avance l’argument de la transition écologique : le site de Grandpuits serait converti en « plateforme zéro pétrole », et consacré à la production de biocarburant à l’horizon 2024.

En réaction à ces annonces, la majorité des travailleurs du site commençaient une grève reconductible, le 4 janvier. A l’heure où nous écrivons ces lignes (1er février), ils sont environ 200 à entamer leur cinquième semaine de grève.

Greenwashing et casse sociale

Sur les 460 emplois du site de Grandpuits, les syndicats dénoncent la suppression de 200 postes – et de 500 emplois supplémentaires parmi les sous-traitants qui dépendent du raffinage. Total promet qu’il n’y aura aucun licenciement, et affirme que les salariés seront redéployés sur d’autres sites, ou prendront leur retraite de façon anticipée. Mais la CGT dénonce des mutations forcées : les salariés ne pouvant pas se permettre de démissionner, ils seront contraints de faire plusieurs heures de route pour aller travailler dans une autre raffinerie du groupe. Du reste, rien ne garantit que Total ne reviendra pas sur sa promesse de ne pas licencier.

Sous couvert de transition écologique, le plus gros émetteur de CO2 en France s’apprête donc à supprimer 700 emplois en quelques mois. En 2019, le pipeline qui relie la raffinerie du Havre à celle de Grandpuits a rompu, entraînant l’arrêt du site pendant cinq mois – et bien sûr la pollution des environs. Ce n’était pas la première fois que ce pipeline vétuste rompait. Pour le remplacer, le groupe devrait investir 600 millions d’euros. Total veut nous faire croire que l’entreprise ne peut pas débourser cette somme. En 2020, pourtant, le groupe a versé 5,83 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires !

La CGT dénonce également la délocalisation de la production de carburant dans des pays où les normes sociales et écologiques sont moins exigeantes. Car Total ne s’est jamais soucié d’écologie : quand ses infrastructures fuient, quand ses pétroliers font naufrage, il verse quelques larmes de crocodile, mais se moque bien de la planète. A Grandpuits, le groupe se sert de l’écologie comme d’un prétexte : au même moment, il développe de grands projets sur le continent africain, dans le mépris le plus complet des populations locales et de l’environnement.

Comme le résume une tribune du collectif « Urgence sociale et écologique », publiée en décembre dans Libération, les mots d’ordre de Total sont simplement : « greenwashing et casse sociale ».

Contrôle ouvrier et transition écologique

La CGT défend la sauvegarde de tous les emplois, et se déclare prête à continuer la grève tant que cette revendication n’aura pas été obtenue. Certains syndicalistes vont même au-delà. Adrien Cornet, délégué CGT, affirme que si la raffinerie était placée sous le contrôle des travailleurs, ils investiraient le temps et les moyens nécessaires pour en finir avec les énergies fossiles et ne plus simplement répondre aux besoins immédiats en pétrole.

Nous sommes parfaitement d’accord avec cette idée. On ne peut pas faire confiance au patronat pour protéger l’environnement. On ne peut faire confiance qu’aux travailleurs, qui savent ce qu’il faut faire – et ont intérêt à le faire, parce qu’ils ne cherchent pas à accumuler des profits.

Ce qui vaut pour Grandpuits vaut pour l’ensemble de l’industrie. Dans nos Thèses sur la crise climatique, publiées en 2020, nous écrivions : « Il n’y a aucune raison pour que le passage à une industrie verte et la fermeture des usines polluantes fassent grimper le chômage. Les travailleurs peuvent être reconvertis et les usines rééquipées. Mais cela suppose la propriété publique des moyens de production, le contrôle ouvrier et, plus généralement, la planification socialiste de l’économie. » C’est la condition sine qua non d’une authentique transition écologique.

Depuis leur entrée en grève, les raffineurs ont reçu le soutien des députés France insoumise (entre autres) et de nombreux syndicalistes. A Grandpuits convergent des cheminots, des agents de la RATP et des militants d’autres secteurs. Cette lutte est emblématique de la période dans laquelle nous nous trouvons : de sa main gauche, la bourgeoisie prétend s’intéresser à l’écologie pendant que de sa main droite elle multiplie les attaques contre les conditions de vie et de travail de notre classe. La détermination des raffineurs est un exemple dont nous avons besoin pour les luttes d’aujourd’hui et demain. En retour, ils ont besoin du soutien de l’ensemble du mouvement ouvrier. Pour les soutenir, donnez à la caisse de grève en ligne !

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