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Le 24 septembre 2020, la direction de Total annonçait aux salariés de la raffinerie de Grandpuits, en Seine-et-Marne, l’arrêt du raffinage de pétrole sur le site dès le premier trimestre de 2021. Le dépôt associé de Gargenville, dans les Yvelines, qui stocke des produits pétroliers, serait concerné par l’arrêt de ses activités à partir de 2023.

L’argument avancé par le géant pétrolier est celui de la transition écologique : le site de Grandpuits devrait être converti en « plateforme zéro pétrole », et utilisé pour la production de biocarburant à l’horizon 2024.

Le 26 septembre, les raffineurs sont entrés en lutte contre Total. Un bras de fer qui vient de marquer une nouvelle étape avec l’entrée en grève reconductible au matin du 4 janvier, largement suivie par l’ensemble des travailleurs du site.

« Greenwashing et casse sociale »

Sur les 460 emplois du site de Grandpuits, les syndicats dénoncent la suppression de 200 postes, et de 500 emplois supplémentaires parmi les sous-traitants qui dépendent du raffinage. Total promet qu’il n’y aura aucun licenciement, et affirme que les salariés seront redéployés vers d’autres sites, ou prendront leur retraite de façon anticipée. La CGT dénonce des mutations forcées : les salariés ne pouvant pas se permettre de démissionner, il ne leur restera plus qu’à faire plusieurs heures de route pour aller travailler dans une autre raffinerie du groupe. Du reste, rien ne garantit que Total ne reviendra pas sur sa promesse de ne pas licencier.

Sous couvert de transition écologique, le plus gros émetteur de CO2 en France s’apprête donc à supprimer 700 emplois en l’espace de quelques mois, dans un bassin où la raffinerie de Grandpuits constitue un pôle économique important, ce que dénoncent aussi les syndicalistes sur le terrain ; comme le rappelle Adrien Cornet, délégué CGT, dans Libération : « chaque poste Total représente entre cinq et sept emplois directs et indirects. Ça va de la boulangerie du coin qui va fermer, à l’école ou encore au restaurant… ».

En 2019, le tuyau qui relie la raffinerie du Havre à celle de Grandpuits a rompu, entraînant l’arrêt du site pendant cinq mois, et bien sûr la pollution des environs. Ce n’était pas la première fois que ce tuyau vétuste rompait ; pour le remplacer, le groupe devrait investir 600 millions d’euros. Total voudrait nous faire croire que l’entreprise ne peut pas débourser cette somme : en 2020, le groupe multimilliardaire reversait pourtant 7 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires !

La CGT dénonce également la délocalisation de la production de carburant dans des régions du monde où les normes sociales et écologiques sont moins exigeantes. Car Total ne s’est jamais soucié d’écologie : quand ses tuyaux fuient, quand ses pétroliers font naufrage, il verse quelques larmes de crocodile, mais se moque bien de la planète. A Grandpuits, le groupe se sert de l’écologie comme d’un prétexte : au même moment, il développe des méga-projets pétroliers et gaziers sur le continent africain – par exemple au cœur d’un parc naturel en Ouganda – dans le mépris complet des populations locales, de la faune et de la flore.

Comme le résume une tribune du collectif « Urgence sociale et écologique », publiée en décembre dans Libération à l’initiative de plusieurs organisations, les mots d’ordre de Total à Grandpuits sont purement et simplement : « greenwashing et casse sociale ».

Contrôle ouvrier

La CGT défend la sauvegarde de l’intégralité des emplois, et se déclare prête à continuer la grève tant que cette revendication n’aura pas été obtenue. Certains syndicalistes vont même au-delà : pour Adrien Cornet, sous contrôle ouvrier, la raffinerie investirait le temps et les moyens nécessaires pour en finir avec les énergies fossiles et ne plus simplement répondre aux besoins immédiats en pétrole.

Nous sommes d’accord avec ce mot d’ordre, qui désigne une situation où toutes les décisions importantes sont prises par l’ensemble des travailleurs, qui imposent à leur patron des décisions permettant de sauvegarder l’emploi et les salaires. Les marxistes n’ont aucune confiance dans le patronat pour qu’il se préoccupe de l’environnement : il n’y a que les travailleurs eux-mêmes qui soient capables de gérer ce qu’ils produisent et comment, en accord avec toutes les normes environnementales. Dans nos Thèses sur la crise climatique de 2020, nous écrivions : « Il n’y a aucune raison pour que le passage à une industrie verte et la fermeture des usines polluantes fassent grimper le chômage. Les travailleurs peuvent être reconvertis et les usines rééquipées. Mais cela suppose la propriété publique des moyens de production, le contrôle ouvrier et, plus généralement, la planification socialiste de l’économie. »

La lutte des travailleurs de Grandpuits est emblématique de la période dans laquelle nous nous trouvons : de sa main gauche, la bourgeoisie fait semblant de s’intéresser à l’écologie pendant que de sa main droite, elle multiplie les attaques contre les conditions de vie et de travail de notre classe. La détermination des raffineurs est un exemple dont nous avons besoin pour les luttes d’aujourd’hui et demain.

Zéro suppression d’emplois ! Contrôle ouvrier de la production !

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