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En 2020 et 2021, la crise du Covid a frappé de plein fouet le secteur des salles de sport privées. Mais depuis, leurs patrons se sont bien rattrapés. En 2022, le chiffre d’affaires des salles de fitness était en hausse de 21 % par rapport à la période pré-Covid. De manière générale, les salles de fitness, d’escalade, de boxe, de yoga ou de futsal ont le vent en poupe.

Par exemple, depuis le mois de janvier dernier, Basic Fit a ouvert plus de 100 nouvelles salles et réalisé 500 millions d’euros de chiffre d’affaires, en hausse de 41 % par rapport au premier semestre 2022. Autre exemple : Arkose, qui gère des salles d’escalade, vise les 45 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année, contre 21 millions en 2019.

Le secret de cette réussite ? Une exploitation intense de la force de travail. Entre le premier semestre 2022 et celui de 2023, la masse salariale de Basic Fit a augmenté de 18 millions d’euros. Dans le même temps, son chiffre d’affaires a augmenté de 146 millions d’euros, soit 8 fois plus. La croissance s’est faite sur le dos des travailleurs.

Exploitation

Dans la « Orange Family » de Basic Fit, on fait tourner les établissements avec le moins de salariés possible. Très souvent, un employé seul, livré à lui-même, doit s’occuper de la gestion de la salle. Au-delà de la charge de travail, cela pose des problèmes de sécurité. Plusieurs salariés – souvent des femmes – disent avoir été victimes d’agressions, d’insultes ou d’intimidations. En réponse, la direction ferme les yeux, « faute de preuves ».

Les salles d’escalade et les restaurants d’Arkose recrutent sur la base d’une ambiance jeune et festive. Les nouveaux arrivants intègrent l’« Arkose Family ». La majorité des employés sont des « hôtes d’accueil polyvalents ». Souvent jeunes et surdiplômés, les employés doivent gérer le bar, le service du restaurant et la vente d’abonnements. Mais on leur demande aussi d’assurer la sécurité sur les murs d’escalade, ce qui implique de prendre la responsabilité des accidents – fréquents et parfois graves – sans avoir reçu de formation aux premiers secours. Parfois, on les retrouve même en cuisine !

Bas salaires et sous-effectifs

Même à Paris, la majorité des salariés d’Arkose touchent le Smic. Ils peuvent commencer tôt le matin (6h30) ou terminer tard le soir (minuit et demi). Ceux qui deviennent « responsables » de pôles obtiennent rarement plus de 50 euros supplémentaires sur leur fiche de paie. Les salariés plus qualifiés, comme les moniteurs ou les ouvreurs (qui construisent les voies sur les murs), touchent en général entre 1400 et 1600 euros nets par mois.

Il arrive souvent que des « hôtes d’accueil » travaillent onze jours de suite, ou qu’ils terminent le soir à minuit et demi pour enchainer le lendemain matin à 8h. En conséquence, les démissions sont fréquentes et aggravent le sous-effectif chronique. Selon Les Echos, il manquerait 0,8 équivalent temps plein par salle de sport, en moyenne. Et les beaux discours sur la « grande famille » de l’entreprise s’arrêtent brutalement dès que des salariés remettent en cause ce modèle. « Si vous n’êtes pas contents, démissionnez », expliquent en somme les patrons de Basic Fit.

Les salariés ne sont pas les seuls à en faire les frais. La réduction systématique des coûts mine les infrastructures et dégrade la qualité des enseignements proposés aux clients. Récemment, dans la salle d’escalade Arkose de Pont de Sèvres, à Boulogne, une gaine de ventilation est tombée sur la tête d’un client, qui a fini aux urgences.

Enfin, les entreprises de ce secteur ont nettement augmenté les prix des entrées, des abonnements et des cours. Pour un nombre croissant de jeunes et de travailleurs, la fréquentation de ces salles de sport est devenue un luxe inaccessible.

S’organiser !

Le discours patronal – « tout le monde est dans le même bateau » – avait relativement bien marché pendant la crise sanitaire. Cependant, la croissance de l’activité et des profits, sur fond d’inflation et de dégradation des conditions de travail, a stimulé le mécontentement et les revendications des salariés.

Dans ce secteur peu syndiqué, les patrons ne lésinent pas sur les moyens de lutter contre la syndicalisation : intimidations, licenciements, chantages… Les éléments « perturbateurs », qui réclament de meilleures conditions, voient leur progression dans l’entreprise paralysée, quand ils ne sont pas poussés à la démission.

Marx expliquait que sans organisation la classe ouvrière n’est que de la matière brute pour l’exploitation. De fait, une couche croissante de salariés commence à tirer les bonnes conclusions : pour changer les choses, il faut s’organiser. Des groupes WhatsApp de plusieurs dizaines de travailleurs se sont formés dans différentes entreprises du secteur, dans le but de créer des syndicats. Ces derniers temps, la CGT s’est implantée notamment chez Climb Up, Arkose, Basic Fit et le Stade Français. La lutte des classes est à l’ordre du jour dans les diverses « familles » du sport en salles !

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