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Chronique du Mexique en luttes, 27 novembre 2006.
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Nouvelle agression policière à Oaxaca.

Samedi dernier, 25 novembre, les adhérents et sympathisants de l’APPO effectuaient une nouvelle marche de protestation pour exiger le changement politique dans l’État d’Oaxaca ; à l’arrivée de la marche au centre-ville, ils ont encerclé le zócalo occupé depuis le 2 novembre par la Police fédérale préventive (PFP). Vers 16 ou 17 heures (selon les sources), on ne sait qui exactement a lancé la première pierre, mais en tout cas la provocation a immédiatement mis le feu aux poudres, et des affrontements de plusieurs heures ont opposé les résistants, armés de pierres et de portes, en guise de boucliers, aux policiers qui les attaquaient à coups de gaz lacrymogènes, de balles en caoutchouc et, pour certains, d’armes à feu. Devant la violence des attaques, les membres de l’APPO ont dû quitter toutes leurs positions, y compris leur campement principal du couvent de Santo Domingo, et se réfugier dans des maisons amies, jusqu’où les policiers les ont pourchassés pendant toute la nuit. Plusieurs sources affirment que des policiers en civil ont attaqué la station d’autobus avec des armes à feu. De leur côté, les résistants ont incendié le Tribunal supérieur de justice, le ministère des Relations extérieures, le ministère du Tourisme et l’Association mexicaine des hôtels et motels d’Oaxaca ; le théâtre Juárez a également été endommagé. L’APPO a cependant déclaré par l’un de ses porte-parole que ces destructions n’avaient pas été planifiées et a répété qu’elle se voulait un mouvement pacifique. Elle a aussi déclaré que dès ce lundi elle reprendrait possession de son campement à Santo Domingo.

De l’intérieur de l’APPO, certains témoignages confirment un manque d’unité sur la question des buts et des moyens, entre, d’un côté, les habitants des quartiers et les jeunes défenseurs des barricades, qui veulent principalement chasser la PFP par tous les moyens, et les membres plus "politiques" qui veulent privilégier la négociation du retrait.

Le soir même, le gouverneur Ulises Ruiz déclarait à tous les médias que la situation était redevenue normale à Oaxaca, que les affrontements avaient été minimes et n’étaient dus qu’à quelques agitateurs qui ne représentaient qu’une petite minorité des habitants. Le dimanche, tandis que les véhicules anti-émeutes quadrillaient sans cesse les rues, les camions municipaux se dépêchaient de déblayer les gravats et de repeindre les façades pour accréditer la thèse du retour à la normale. Le nombre de blessés et d’arrestations dément cependant de lui-même la thèse de l’escarmouche : de l’aveu même du Parquet général de justice, 149 personnes ont été mises à la disposition de la justice ; quant aux blessés, leur nombre précis n’est pas fixé, mais selon les sources il varie entre 150 et 200 ; il semble certain aussi que trois personnes ont été tuées. Les films et les photos attestent également de l’extrême violence et de l’ampleur des combats.

Impunité par soumission du pouvoir judiciaire à l’exécutif.

Pendant ce temps, le même Parquet général refuse de révéler le résultat de l’enquête sur le meurtre du journaliste états-unien Bradley Will, tué le 28 octobre dans la première attaque des barricades par des paramilitaires. En revanche, on atteint maintenant des centaines d’inculpations et d’ordres d’arrestation contre des militants de l’APPO.

La même complaisance du pouvoir judiciaire vis-à-vis de l’exécutif a lieu autour des tortionnaires d’Atenco : il existe une institution nationale particulière pour les délits "liés aux actes de violence contre la femme" ; or, cette institution n’a toujours pas été saisie du cas des seize femmes qui ont déposé plainte pour avoir été violées par les policiers après leur capture les 3 et 4 mai dernier lors des affrontements de San Salvador Atenco. Les associations locales et nationale des droits de l’homme multiplient les dénonciations et les appels ; elles ont obtenu que le Comité pour l’élimination des discriminations contre les femmes de l’ONU demande à l’État mexicain de vérifier et de punir les coupables de ces viols. Sans le moindre résultat jusqu’à présent. De même, le Comité contre la torture, dépendant des Nations unies, a pressé le Mexique d’effectuer une enquête rapide et impartiale sur les événements d’Atenco, les féminicides de Ciudad Juárez et les plaintes récentes pour tortures et violences à Oaxaca ; le Comité a donné un an au gouvernement pour fournir une information sur la réalisation de ses recommandations.

Réactions à Mexico et craintes pour l’avenir.

Les membres et sympathisants de l’APPO dans la capitale fédérale ont bloqué un axe central pendant une heure, ainsi que les postes de péage de deux autoroutes menant à la capitale, en guise de protestation contre la violence policière de ce samedi. Dans une conférence de presse, ils ont exposé leur crainte que la répression ne fasse que commencer, du fait que, selon une rumeur, l’armée serait prête à intervenir à son tour à Oaxaca, et en raison des déclarations du futur président, Felipe Calderón, qui a déjà promis d’utiliser la manière forte dans ce conflit. Une marche a également eu lieu vers le zócalo de Mexico, au terme de laquelle, devant le Palais national, 28 volontaires se sont ouvert les veines en criant : "Si ce que veut le gouvernement c’est du sang, voici le sang du peuple du Mexique." Cependant, malgré la difficulté du combat et l’intensité de la répression, une chose est sûre : le processus entamé est irréversible, partout surgissent des associations indigènes de plus en plus nombreuses, de plus en plus déterminées à poursuivre une lutte à long terme pour le respect de leurs droits et de leur autonomie.

Appel à des réactions internationales.

L’APPO et diverses organisations qui en sont membres demandent aux Nations unies et aux autres organisations internationales de se prononcer sur ces délits ; ils demandent une intervention de la Croix-Rouge internationale pour assister les nombreux blessés. Un appel est fait également aux associations des droits de l’homme et aux associations sociales au niveau national comme international pour organiser des actions de protestation devant les institutions et ambassades et envoyer des messages aux autorités politiques pour qu’elles fassent cesser le massacre à Oaxaca.

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