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Mardi 12 avril, le Conseil départemental 31 (CD31), à majorité « socialiste », a voté en assemblée plénière la fin de la prise en charge hôtelière des mères isolées avec enfant de moins de 3 ans, des mineurs isolés et des majeurs isolés. Dans la même motion était votée la création de 450 places d’accueil, mais réparties sur 3 ans.

Dans les faits, ce sont 430 jeunes et mères isolés qui vont se retrouver à la rue, dès l’application de la mesure, car sans solution d’hébergement. Or la protection de l’enfance est une mission obligatoire du Conseil départemental. Mais les élus du CD 31, plutôt que favoriser l’aide et la protection sociale, préfèrent offrir un total de 52,7 millions d’euros pour la construction du nouveau Parc des expositions et du stade Arnauné, ou pour la rénovation du stadium de Toulouse !

Dès l’annonce de cette motion, les travailleurs sociaux se sont mobilisés, et l’intersyndicale SUD-CGT-FO du CD 31 a lancé un appel à un rassemblement dans la cour de l’hôtel du département, le jour même du vote, afin de faire pression sur les élus.

Mobilisation rassemblant la jeunesse et les salariés

Près de 600 personnes se sont mobilisées, le plus remarquable étant la participation d’autres secteurs en lutte. En effet, les étudiants et les lycéens ont répondu présents, ainsi que le DAL (Droit au Logement), le SAMU social, les intermittents du spectacle, Nuit Debout Toulouse et même une délégation du personnel hospitalier du CHU Purpan.

Mais les manifestants ont trouvé toutes les grilles de l’Hôtel du département fermées et cadenassées. De l’histoire des luttes sociales au CD 31, on n’avait jamais vu ça. Une partie des manifestants s’est malgré tout frayé un chemin après avoir fait sortir les grilles de leurs gonds. Mais ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’était d’être bloqué par une deuxième série de grilles, bloquant l’accès à la cour du bâtiment public. Amassés devant cette dernière grille, ils interpellèrent les élus sortis de l’assemblée. En réponse, ils virent arriver les CRS.

La réalité du dialogue social : l’envoi de CRS

Pas moins de 10 camions encerclèrent le bâtiment et, rapidement, les CRS en tenue de « robocop » firent face aux manifestants derrière les grilles, formant un cordon de protection. Les grilles, les CRS, et derrière, les élus. Le visuel était assez significatif pour que les manifestants scandent en chœur : « les élus ont peur du peuple ! », « Police partout, justice nulle part ! ».

Tous les manifestants n’avaient pas pu franchir la première grille, les CRS arrivant sur les lieux assez rapidement pour les en empêcher. Le cortège était donc scindé en deux : une partie derrière l’entrée de la bouche de métro, la deuxième en haut du jardin face aux grilles de la cour. Le risque était grand d’être pris dans une souricière. Les CRS commençant à remonter le jardin, les manifestants décidèrent de sortir du jardin pour se retrouver en assemblée générale devant le parvis de l’entrée principale afin de décider de la suite du mouvement.

Malgré les réticences de l’assemblée générale, l’intersyndicale insista pour envoyer une délégation afin « de faire prendre conscience aux élus des conséquences de la motion votée ». La direction du CD 31 appliqua alors une méthode bien connue des syndicats : elle joua la montre en promettant de recevoir la délégation, tout en repoussant d’heure en heure le rendez-vous. Au final, elle ne fut jamais reçue, ce qui acheva de discréditer le théâtre du « dialogue social » dont personne sur place n’était dupe, excepté l’intersyndicale qui feignait d’y croire encore.

Une AG déterminée et solidaire pour la convergence des luttes

Lors de l’AG, il y eut différentes prises de parole : les étudiants du Mirail affichèrent leur soutien et leur détermination, tout comme les membres de Nuit Debout Toulouse ; le DAL 31 assura de son aide juridique pour attaquer en justice le CD sur le fait de mettre à la rue les personnes sans proposer de solution d’hébergement, tandis que le SAMU social alerta sur les difficultés actuelles d’hébergement d’urgence ; enfin les soignants de Purpan rappelèrent le manque de personnel criant dans les hôpitaux et les intermittents insistèrent sur la nécessité de la convergence de toutes les luttes.

Le plus poignant fut la prise de parole de jeunes mineurs ayant fui les dictatures et la famine de leur pays (la plupart venant d’Afrique). Ils témoignèrent, racontant comment ils avaient traversé le continent africain, passé la mer Méditerranée alors que se noyaient sous leurs yeux leur frère, leur sœur ou d’autres membres de leur famille. La violence de ces témoignages plongea l’assemblée dans un silence tendu, et lorsque les jeunes remercièrent en pleurant les manifestants, ces derniers les applaudirent en criant leur soutien. C’était un moment très intense, de communion et de solidarité, qui renforça les liens entre les manifestants et les victimes des mesures austéritaires, et leur détermination à continuer ensemble le mouvement.

Il fut décidé de reprogrammer un rassemblement la semaine suivante avec une occupation du parvis du Conseil départemental avec des tentes, car le dernier mouvement des travailleurs sociaux avait remporté la victoire de la sorte.

Un mouvement social riche d’expériences

On ne sait pas d’avance quelle sera l’issue de ce mouvement, mais ce qui est certain, c’est que la jonction des salariés des différents secteurs en lutte avec la jeunesse dépasse les directions syndicales, qui n’avaient absolument pas prévu l’afflux de toutes ces personnes, et encore moins des étudiants, qui s’organisent pour intervenir dans les luttes des salariés.

La loi El Khomri aura eu pour effet de jeter dans la lutte une partie de la jeunesse, lui faisant prendre d’ores et déjà conscience de la nécessité de s’allier aux salariés. Cette prise de conscience, sa mobilisation et sa détermination sont systématiquement saluées par tous les salariés en AG.

Quoiqu’il arrive, cette fraternisation entre la jeunesse et les salariés, la nécessité de la convergence des luttes s’imposant au point de dépasser les directions syndicales frileuses, annonce un mouvement social qui ne peut que sortir enrichi de toutes ces expériences.

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