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En chute libre dans les sondages, la popularité de Sarkozy avoisine celles des présidents et premiers ministres du passé dans les moments les plus tourmentés de leurs mandats. Derrière cet effondrement, il y a tout d’abord la désillusion chez tous ceux qui, aux présidentielles, ont écouté les sirènes de la presse et de l’industrie audiovisuelle, et comprennent qu’ils se sont fait avoir. Mais il y a un élément de ce retournement qui mérite d’être examiné de plus près. A peine moins d’un an après son élection, les mêmes journaux, les mêmes magazines, les mêmes journalistes de télévision qui formaient un vaste orchestre de propagande en sa faveur – l’accablent désormais de critiques, s’offusquent de son comportement, l’affublent de surnoms, le ridiculisent même. Ceci est très significatif. Cela indique que la classe capitaliste, qui voyait en Sarkozy son champion, est aujourd’hui profondément inquiète des possibles conséquences de son comportement.

Le magazine allemand Der Spiegel du 27 janvier se demandait « si le président français est assez mûr pour diriger l’une des grandes nations nucléaires de la planète ». Le gouvernement passe d’une crise à l’autre. Les ministres se contredisent entre eux et se contredisent eux-mêmes. Pratiquement chaque discours donne lieu à des polémiques, à des démentis et des « recadrages ». Les individus qui écrivent les discours de Sarkozy – Henri Guaino, Emmanuelle Mignon, etc. – s’en vantent ouvertement à la télévision, expliquant pourquoi ils ont mis telle ou telle phrase dans sa bouche. Et la presse reproche à ces mêmes scribes d’abuser d’un président trop influençable ! Même les députés UMP n’hésitent plus à proférer des remarques acides à l’encontre de leur chef suprême. Ils redoutent que l’arrogance, les provocations et le côté « m’as-tu-vu » du président ne finissent par réveiller dans la conscience populaire un ressentiment capable, dans certaines circonstances, de se transformer en une force irrésistible et qui les emportera tous.

Quand les médias capitalistes essaient de mettre le président en garde contre l’étalage sans vergogne de sa fortune, de sa vie de luxe, des largesses dont il bénéficie auprès de ses « amis » et « frères » milliardaires, de la cour qui s’agite sans cesse autour de lui, Sarkozy répond qu’il fait au grand jour ce que d’autres faisaient et font encore en cachette. Justement ! On voit bien là toute la myopie et toute la bêtise de ce parvenu tonitruant. Si la classe capitaliste « ne parle pas argent », ne se vante pas de sa richesse, de ses châteaux, de ses hôtels particuliers et « propriétés » à n’en plus finir, de ses hélicoptères, de ses jets privés et de tous les autres attributs d’une vie gagnée sur l’exploitation des autres, c’est pour une très bonne raison. Le « charme discret de la bourgeoisie » repose sur la conscience de la précarité de sa position. Il ne faut pas provoquer ceux qui n’ont rien, ceux qui triment pour simplement tenir la tête hors de l’eau, qui subissent l’humiliation quotidienne du chômage, des conditions de logement abominables, de la discrimination raciale. Sarkozy, lui, est visiblement insensible à cette considération, qui n’est pourtant pas un détail dans le maintien de « l’ordre établi ».

L’inquiétude de la classe dirigeante est d’autant plus forte qu’elle sait pertinemment, au-delà de la propagande gouvernementale, quelles sont les véritables perspectives économiques – et donc sociales – pour la France. La croissance du PIB, déjà très faible en 2007, le sera encore plus en 2008. Le chômage et la pauvreté s’aggravent dans les faits, malgré le trucage des statistiques. Le pouvoir d’achat se dégrade pour la vaste majorité de la population. Le gouvernement n’a aucune réponse à ces problèmes. Sa politique tend à les accentuer, au contraire. Son seul recours consiste à multiplier les fausses promesses, les diversions et les subterfuges. C’est l’acharnement contre les travailleurs étrangers, contre les chômeurs. C’est aussi le spectacle de la cour élyséenne. Pour ne pas qu’ils regardent autour d’eux, il faut attirer l’attention des travailleurs vers le haut, là où il « se passe toujours quelque chose » – des vacances, un mariage, une annonce surprise. Il faut distraire, gagner du temps.

La diversion permanente, la cacophonie, l’instabilité au sommet de l’Etat, la volatilité de l’opinion, la déception profonde de ceux qui croyaient en Sarkozy, l’hostilité croissante de ceux qui n’y ont jamais cru, la dégradation constante des conditions de vie des travailleurs, des chômeurs, des retraités, la multiplication de grèves dans le public et le privé – ce sont autant de signes précurseurs des grands événements qui nous attendent.

D’ores et déjà, les mobilisations contre le patronat et le gouvernement seraient bien plus importantes si les organisations syndicales et les partis de gauche ne se trouvaient pas dans un état d’impréparation totale. La situation actuelle exige autre chose que des politiciens pantouflards, craintifs, tellement modérés et responsables qu’ils ont renoncé une fois pour toutes à la lutte pour le socialisme. Nous avons besoin de dirigeants combatifs, courageux, aussi déterminés et implacables que nos adversaires au gouvernement et au MEDEF. Le cœur du problème, c’est la propriété capitaliste des banques et des grands moyens de production. Le dirigeant de « gauche » qui n’ose pas y toucher se condamne à l’impuissance, se condamne à trahir. Le grand défi des années à venir, c’est le réarmement politique des travailleurs. Tel est le sens de notre combat.

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