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Les acquis des luttes passées sont sans cesse remis en cause par le patronat. Le droit à la retraite dans des conditions dignes, qui n’existe pas pour tout le monde, risque de devenir encore plus aléatoire si le MEDEF parvient à imposer sa volonté. La retraite à 60 ans a été l’un des acquis les plus importants du gouvernement de gauche de Pierre Mauroy (1981-1984). Cette réforme, qui laissait beaucoup à désirer dans son application concrète, représentait néanmoins un pas en avant, dans la mesure où elle permettait à un travailleur de prendre sa retraite à soixante ans, au lieu de soixante-cinq ans auparavant, et ce à taux plein, c’est à dire sans abattement sur le montant de la pension, à condition d’avoir accumulé une durée de cotisation suffisante.

Cette mesure s’appliquait directement au régime de base de la sécurité sociale. Pour les autres régimes (ARRCO ou, pour les cadres, AGIRC), un accord dit "ASF" a été signé en 1983 - et reconduit depuis à trois reprises - qui permet aux salariés de toucher la pension qui leur est due dès l’âge de soixante ans et sans abattement. Or, cet accord, reconduit pour la dernière fois en 1996, est aujourd’hui expiré, et le MEDEF cherche à imposer à sa place un nouveau système, plus défavorable aux salariés.

Dans les négociations entre les organisations syndicales et le patronat, les syndicats s’efforcent de résister à une dégradation des conditions de retraite. Le MEDEF, pour sa part, exige qu’à partir du 1er janvier 2004, la durée de cotisation requise pour l’obtention d’une pension à taux plein soient augmentée par tranches de trois mois chaque année jusqu’en 2010. En même temps, le MEDEF veut imposer des abattements, c’est-à-dire des réductions du montant des pensions perçues par les retraités, pour les salariés qui "choisiraient" de partir avant cet âge de retraite toujours plus lointain. Sur le papier, toujours selon le projet du MEDEF, le droit à la retraite à soixante ans serait maintenu, mais dans des conditions de durée de cotisation telles que dès 2006 plus personne ne pourrait les remplir. Pour prendre sa retraite à presque 62 ans en 2008, par exemple, il faudrait avoir accumulé 47 ans de cotisation, c’est-à-dire avoir commencé à travailler sans interruption dès l’âge de 13 ans ! Les propositions du MEDEF se traduiront dans les faits par une réduction dramatique du montant des pensions et par la suppression dans les faits de la retraite à soixante ans, laquelle est dores et déjà hors de la portée d’une partie très importante des salariés.

Pour renforcer le camp des syndicats dans les négociations en cours, La Riposte en appelle à une participation massive aux manifestations qui sont prévues sur l’ensemble du territoire national. Pour des renseignements plus précis, nous conseillons à nos lecteurs de contacter les structures syndicales départementales.

On ne doit en aucun cas tolérer cette nouvelle atteinte aux droits des salariés. Le gouvernement, comme d’habitude, feint de ne pas prendre position, laissant sciemment la porte ouverte à une nouvelle régression sociale, si jamais la mobilisation des salariés sur le terrain ne l’empêche pas. La lutte immédiate a nécessairement un caractère défensif, en ce sens qu’elle vise à empêcher une dégradation substantielle des conditions de retraite actuellement en vigueur. Ceci ne doit pas nous faire oublier que ces conditions sont elles-mêmes bien en dessous de ce dont devraient bénéficier tous les salariés, y compris ceux ou celles qui, pour différentes raisons, n’ont que peu travaillé au cours de leur vie, ou même pas du tout. Chaque individu doit pouvoir entamer la dernière phase de sa vie dans des conditions matérielles dignes et correctes et, dès l’âge de soixante ans, toucher une pension adéquate. Cette pension ne devrait en aucun cas être inférieure au SMIC (sur la base des 35 heures). Par ailleurs, étant donnés les aléas du système capitaliste, dans lequel nous vivons, la stipulation d’une période minimum de cotisation n’est pas vraiment satisfaisante. Une mère de famille, par exemple, qui n’a travaillé en entreprise que durant dix années, devrait tout de même bénéficier, à soixante ans, d’une pension correcte.

Et que les pouvoirs publics ne répondent pas à ces revendications en prétextant, comme à leur habitude, un "manque d’argent". Cette considération (ni aucune autre d’ailleurs) n’a pas été évoquée, il y a quelques années, lorsqu’il fallait trouver, en l’espace de quelques jours, 140 milliards de francs pour "renflouer" le système bancaire. Les 130 milliards de francs versés en ristournes au patronat sous prétexte de réduction de la semaine de travail n’ont pas non plus posé de problème, pas plus que les dépenses colossales engagées pour le bombardement de la Serbie en 1999. Il faut enfin rappeler que le budget militaire de la France, fixé pour l’année en cours à 245 milliards de francs, est le plus élevé au monde (par tête d’habitant) après celui des États-Unis.

Les arguments financiers sur la "viabilité" du système des retraites par répartition ne servent qu’à masquer le véritable enjeu des manœuvres en cours, à savoir l’ouverture complète de ce "marché" aux compagnies d’assurances privées, lesquelles occupent une place de plus en plus importante parmi les quelques deux cents grands groupes capitalistes qui dominent l’économie française.

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