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L’extraordinaire combativité de la grève des Urgences, ces huit derniers mois, est en passe de gagner l’ensemble des personnels de l’hôpital. A l’instar du Collectif Inter-Urgences, un Collectif Inter-Hôpitaux s’est formé et mobilise le personnel médical, paramédical, administratif et social.

Il a organisé une première AG le 10 octobre dernier, à Paris. Elle a réuni plus de 500 hospitaliers dans un amphithéâtre de la Pitié-Salpêtrière. Collectivement, ils ont élaboré un plan d’urgence pour l’hôpital – contre les politiques d’austérité et pour libérer la santé des logiques de profit.

Des médecins, dont certains « pontes », étaient présents, aux côtés des centaines d’aides-soignants, infirmiers et étudiants. Leur présence est un symptôme de la profondeur de la crise sociale que traverse l’hôpital.

Voici cinq des principales revendications votées par cette AG du 10 octobre. Nous faisons suivre chacune de nos explications et commentaires.

1) Une augmentation de l’ONDAM à hauteur de l’augmentation programmée des charges (au minimum de 4 %).

L’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) fixe le budget des soins de ville, de l’hospitalisation dans les établissements publics ou privés, et des centres médico-sociaux. Cette année, la croissance a été fixée à 2,5 %, pour atteindre 200 milliards d’euros. C’est très insuffisant pour répondre aux besoins – d’autant que les charges, elles, augmentent de 4 % pour la même année.

Depuis dix ans, cet indice n’a pas dépassé la barre des 3 %. Un pic a été atteint en 2003 (plus de 5 %). Mais depuis la crise de 2008, il s’est effondré, austérité oblige.

2) La suppression de la tarification à l’activité.

Le modèle libéral de soin (les « soins de ville », en particulier) est basé sur la tarification à l’activité, qui est une rémunération à la prestation, selon le nombre et le type de soins. Or, d’une part, ce système produit des dépassements d’honoraires parfois très élevés, alors que la précarité, la carence d’accès aux droits et les inégalités ne cessent d’augmenter dans la population. D’autre part, le modèle libéral a jeté les bases de la tarification à l’activité pour le modèle salarié de soins, qui transforme les hôpitaux en entreprises de la santé. Alors que le tiers de la population renonce aujourd’hui à certains soins, faute d’argent, le déremboursement des soins et le pillage de la Sécurité sociale s’accélèrent au profit du privé. Pour ces raisons, de plus en plus de jeunes, dont les internes des hôpitaux, se rebellent contre la tarification à l’activité et la « médecine à deux vitesses » qu’elle engendre.

3) L’augmentation de tous les salaires de 300 euros.

Cette revendication est « une nécessité, non un supplément de confort », a rappelé une salariée d’un hôpital parisien, lors de l’AG. Faute de pouvoir se payer un logement décent, elle loge depuis un an dans une salle de garde. Une assistante sociale s’est indignée de ne gagner que 1400 euros mensuels après cinq ans d’expérience.

4) L’arrêt des fermetures de lits d’hospitalisation et l’ouverture de lits dans les services où il existe des besoins, avec embauche des personnels nécessaires.

Au nom du « virage ambulatoire » imposé par les gouvernements successifs, l’hospitalisation est décidée par des critères de rentabilité, et non par des critères sanitaires. Avec Macron, ce sont les multimillionnaires des groupes privés qui sont à la manœuvre. D’un côté, les investissements vont aux Maisons de santé, aux établissements publics-privés et à toutes sortes de cliniques spécialisées (privées). La médecine libérale y est de plus en plus impliquée, via différentes formes de contrats avec les praticiens. D’un autre côté, les hôpitaux publics de proximité s’écroulent sous le poids de l’austérité.

5) L’intégration et l’association des usagers et des soignants, toutes catégories confondues, aux décisions et projets de soins de leurs établissements.

Cette juste revendication pose directement la question de la propriété – privée ou publique ? – du secteur de la santé. Aujourd’hui, les actionnaires de l’hospitalisation, de la recherche privée, des mutuelles et de l’industrie pharmaceutique considèrent le patient comme un client, le soin comme un service quasi commercial. Les usagers et soignants n’ont pas leur mot à dire. Seule la nationalisation de ces secteurs peut nous libérer de l’emprise du capitalisme sur la santé, donner aux soignants les moyens de faire correctement leur travail et permettre un contrôle démocratique de ce secteur par les soignants et la population en général.

Dans la foulée de l’AG, un étudiant en médecine écrivait : « tout conflit est une occasion de révolutionner l’hôpital […] Il reste au corps médical la tâche de faire sienne la longue tradition des luttes hospitalières, et aux AG locales de fleurir partout où la dignité et le respect des patients sont bafoués. » C’est la voie à suivre. Dans la perspective du 5 décembre, la généralisation du mouvement gréviste à l’ensemble du secteur hospitalier, au plan national, serait un pas décisif dans le développement des luttes dans tous les secteurs de l’économie.

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