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Du point de vue de la santé publique, le « plan » de déconfinement présenté par le gouvernement a tout d’une aventure. Il change d’heure en heure – et même de ministre en ministre. Les contradictions et incertitudes s’accumulent. Quant aux moyens humains et matériels mobilisés, ils sont toujours aussi insuffisants. La plupart des scientifiques et des médecins affichent leur scepticisme et leur inquiétude. Même le très servile « Conseil scientifique » désapprouve ce plan. Des semaines durant, le gouvernement s’est abrité derrière ce Conseil ; désormais, il le renvoie à ses éprouvettes.

Du point de vue de la course aux profits, par contre, ce « plan » est cohérent. Il n’a même de sens que de ce point de vue. Pour la classe dirigeante et son gouvernement, la course aux profits prime sur tout le reste, y compris sur la santé publique. Leur objectif est donc très clair : relancer au plus vite la machine économique – et les profits qu’elle génère. C’est à cette priorité absolue que le gouvernement subordonne la question du nombre de victimes d’une éventuelle deuxième vague de l’épidémie. Comme nous l’écrivions au lendemain du dernier discours de Macron : « Ce qui leur importe, c’est que l’afflux de malades n’excède pas trop les capacités du système hospitalier, de façon à ce que le gouvernement ne soit pas contraint de faire marche arrière : un nouveau confinement, cet été, briserait net la relance de l’économie, qui est l’objectif sacré de la bourgeoisie. »

D’un mensonge à l’autre

Tout le monde a compris, désormais, que la réouverture des établissements scolaires n’a rien à voir avec la lutte contre les « inégalités scolaires » ou « de logement ». En réalité, il s’agit de transformer l’Education nationale en une gigantesque garderie, de façon à renvoyer au travail un maximum de parents.

Lorsque le gouvernement affirme que les parents pourront « choisir » d’envoyer leurs enfants à l’école, il ment, une fois de plus, car dans le même temps il menace les parents de perdre tout ou partie de leurs revenus s’ils ne reprennent pas le travail. A cette pression va s’ajouter celle des patrons et des chefs de service, qui eux aussi menaceront les salariés. Par ailleurs, pour les nombreuses familles confinées dans des appartements trop petits, le « choix » n’est pas réel. A partir du 11 mai, des millions de travailleurs vont donc plonger dans l’angoisse d’un déconfinement chaotique. Comme toujours, les premiers frappés seront les plus pauvres, les plus exploités, les plus opprimés. Ce sont les mêmes qui souffrent le plus de la crise sanitaire et du confinement. Les contradictions de classe balayent la fiction de « l’union nationale ».

Contrôle ouvrier

Depuis le début de cette crise, nous avons publié plusieurs articles sur le programme d’urgence que, selon nous, la gauche et le mouvement ouvrier devraient défendre, dans le contexte actuel [1]. Dans ce programme, le « contrôle ouvrier » occupe une place centrale. Par « contrôle ouvrier », on désigne cette situation exceptionnelle au cours de laquelle les travailleurs prennent collectivement le contrôle des opérations de production, dans l’entreprise, et imposent ainsi leur volonté au patron sur toute une série de questions : les conditions de travail, le temps de travail, les rotations, les effectifs, les mesures de sécurité, etc.

Aujourd’hui, le développement du « contrôle ouvrier » est une question de vie ou de mort. Jean-Luc Mélenchon l’a récemment formulé ainsi : « Aux travailleurs qui vont reprendre le travail, je dis : réunissez-vous sur les lieux de travail pour assurer les conditions sanitaires de la production. » C’est bien dit. Le mouvement syndical doit donner corps à cette idée, c’est-à-dire convoquer ces réunions de salariés et organiser le contrôle ouvrier de la production dans un maximum d’entreprises.

Rompre avec le capitalisme !

Il faut prendre toute la mesure de la gravité de la situation. Par exemple, le 22 avril, Le Figaro publiait un article intitulé : Pourquoi un tsunami de licenciements est inévitable. Son auteur, Marc Landré, expliquait : « l’Etat (…) ne va pas régler pendant des mois les salaires de plusieurs millions de personnes. Et sans cette perfusion, les entreprises exsangues après des semaines à l’arrêt ou au ralenti n’auront d’autre choix que de licencier. » En conséquence, « les suppressions de postes se chiffreront en centaines de milliers, si ce n’est en millions. »

C’est exact. La récession qui s’engage sera dévastatrice. La gauche et le mouvement ouvrier doivent tirer des conclusions radicales. L’heure n’est plus aux savants « compromis » entre les intérêts du patronat et des salariés. Bien sûr, il faudra toujours lutter pour défendre nos conditions de travail et nos acquis sociaux, dans le cadre du capitalisme. Mais face à la catastrophe économique annoncée (et inévitable), la lutte contre la régression sociale doit être liée à une lutte positive, offensive, pour en finir avec le capitalisme lui-même.


[1] Lire notamment COVID-19 : la catastrophe imminente et les moyens de la combattre et Discours de Macron : le déconfinement des profits.


Sommaire

La fiction de « l’union nationale »
Contre la réouverture chaotique des écoles : mobilisation !
Reprise des chantiers : le grand marchandage – sur le dos des travailleurs
Confinement : explosion des violences conjugales
La crise sanitaire aggrave la précarité étudiante
La crise du Parti travailliste entre dans une nouvelle phase
Aux partisans de Bernie Sanders : ne vous lamentez pas, organisez-vous !
L’Afrique, la pandémie et le rôle de l’impérialisme
Marxisme et révisionnisme (Lénine)
Non à la réquisition des migrants dans le secteur agricole !

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