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L’Union européenne a été vendue à l’opinion publique, depuis des décennies, comme un moyen de garantir la croissance économique, la prospérité et la stabilité. Mais la réalité de l’Europe ne correspond en rien à cette propagande réactionnaire. L’Union européenne est en récession. Dans tous les pays membres, la production industrielle s’effondre. Même avant la récession, la précarité de l’emploi, le chômage et la « grande misère » existaient et s’aggravaient. La croissance du PIB, dans tous les pays de l’Union, se réalisait au prix d’une pression constante sur le niveau de vie de la masse de la population. Mais en même temps, conformément aux lois de l’économie capitaliste, cette croissance préparait inéluctablement la récession que nous sommes en train de subir. La récession accélère à l’extrême la baisse du niveau de vie des populations.

Selon les prévisions de l’Union européenne, le produit intérieur brut de la zone euro baissera de 1,9% au premier trimestre 2009, après un recul de 1,6% au quatrième trimestre de 2008. La chute de la production industrielle est particulièrement sévère. Après un recul de 5,3% au quatrième trimestre 2008, elle devrait encore chuter de 7,0% sur les trois premiers mois de 2009. Les capitalistes investissent de moins en moins dans l’économie européenne. L’investissement dans l’UE a baissé de 5%, au premier trimestre de cette année. Pour préserver leurs profits, leur pouvoir et leurs privilèges, les capitalistes détruisent des capacités productives, démantèlent des industries entières et jettent des millions de travailleurs sur le pavé.

Rivalités impérialistes

En quoi consiste l’Union européenne ? S’agit-il – comme le prétend par exemple André Gerin, un dirigeant oppositionnel du PCF –, d’une « puissance impérialiste » qui aurait assujetti toutes les nations qui la composent ? Pas du tout. Cette vision des choses ne correspond à aucune réalité. Si nous l’acceptions, nous serions incapables de comprendre aussi bien ce qui se passe en Europe, actuellement, que les perspectives sociales, économiques et politiques qui en découlent. Non, l’UE n’est pas une seule puissance impérialiste, mais un ensemble d’accords entre plusieurs puissances impérialistes rivales, qui déterminent ensemble la politique de l’Union européenne suivant leurs propres intérêts, au détriment des travailleurs de tous les pays concernés.

La politique de l’Union européenne est taillée sur mesure dans l’intérêt des groupes capitalistes les plus puissants – que ce soit des secteurs financier, industriel ou de la distribution. L’introduction de la monnaie unique visait à éliminer les risques que représentaient les fluctuations monétaires, du point de vue des grands investisseurs internationaux. Au niveau des Etats membres, la politique de l’UE répond avant tout aux intérêts des classes dirigeantes des pays impérialistes les plus importants, à savoir l’Allemagne, la France, l’Italie, la Grande-Bretagne et l’Espagne. Ni la Grèce, ni la Hongrie ou le Portugal ne peuvent résister à la volonté des grandes puissances. Et quand ces dernières ne sont pas d’accord entre elles, c’est la volonté de la plus grande – l’Allemagne – qui prévaut. L’Union européenne, ce n’est pas la « coopération », mais la loi du plus fort. Quant à l’idée que la Commission européenne impose aux « nations » des politiques et des mesures dont elles ne veulent pas – elle est tout simplement ridicule. La politique de la Commission européenne est dictée par les capitalistes européens, et surtout par les plus puissants d’entre eux.

Des tensions et désaccords ont toujours existé entre les pays membres de l’UE. La récession actuelle ne fait que les attiser. Tels des brigands qui s’entendent plus ou moins bien tant qu’il y a assez de butin pour tous, mais qui s’égorgent quand ce n’est plus le cas, les pays membres essaient de se décharger des conséquences de la récession sur leurs voisins. Là encore, ce sont les pays les plus faibles qui subiront le plus. Et si les « grands » acceptent de les aider, c’est surtout pour éviter que, par effet de contagion, l’effondrement qui frappe la Lettonie ou la Hongrie n’entraîne la chute du système bancaire en France ou en Allemagne, qui ont engagé des centaines de milliards en crédits douteux dans ces mêmes pays. Par exemple, les engagements des banques autrichiennes en Europe de l’Est sont de l’ordre de 300 milliards d’euros, soit environ 80% du PIB de l’Autriche ! Aux travailleurs des pays qui ont récemment rejoint l’Union, les propagandistes du capitalisme avaient promis un avenir radieux, avec une augmentation régulière de leur niveau de vie. Or le PIB de la Hongrie a chuté de 10,5% en l’espace d’un mois. En sept mois, la monnaie polonaise a perdu 50% de sa valeur par rapport à l’euro, celle de la Hongrie a chuté de 30% et celle de la République tchèque de 23%.

Sortir de l’UE ?

André Gerin et autres « souverainistes » (au PCF et ailleurs) se déclarent favorables à une « sortie de l’UE » – afin de retrouver, disent-ils, l’indépendance nationale de la France. Ce programme est un leurre réactionnaire. Sortir de l’Union Européenne sur la base du capitalisme ne résoudrait strictement rien. Au contraire, cela entraînerait une aggravation extrême de la crise économique, en France comme dans l’ensemble de l’UE. Cela voudrait dire quoi, exactement ? Eriger des barrières douanières contre les autres pays membres ? Rétablir le franc à la place de l’euro ?

Des mesures protectionnistes françaises contre le reste de l’Europe entraîneraient immédiatement des contre-mesures du même type, contre la France. Et dans les conditions actuelles, avec un déficit public de 1200 milliards d’euros et un déficit du commerce extérieur de quelque 60 milliards d’euros par an, le rétablissement du franc signifierait le rétablissement d’une monnaie nationale en plein effondrement. Le franc serait d’emblée très fortement dévalué, réduisant de façon draconienne le pouvoir d’achat des travailleurs de France, et renchérissant massivement le prix de tous les produits importés.

L’idée que le fait de quitter l’UE « libèrerait » la France des décisions réactionnaires des instances européennes est un leurre. Ces décisions ne sont que la traduction, dans la législation européenne, des intérêts des capitalistes « nationaux » de chaque pays, dont ceux de la France. Nous sommes contre Maastricht, contre Lisbonne et contre tous les traités capitalistes. Mais avec ou sans ces traités, c’est le capitalisme qui est en cause. Les pays qui ne sont pas sous la coupe de ces traités n’en sont pas moins affectés par les conséquences sociales du système capitaliste.

La question n’est pas de savoir si la nation française est « souveraine » ou pas, mais de savoir quelle classe est souveraine, au sein de la nation. Le devenir de l’Europe est une question de classe. Pour poser le problème brutalement : soit, dans les années à venir, les travailleurs de l’Europe – d’abord dans un pays, puis, par extension, dans les autres – parviennent à mettre fin à la propriété capitaliste des moyens de production ; soit l’ensemble du continent sombrera dans une dépression économique comparable à celle des années 1930, plongeant la vaste majorité de sa population dans une précarité absolue. L’Europe capitaliste « sociale » à laquelle croient – ou feignent de croire – les politiciens réformistes ne verra jamais le jour. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une France socialiste et d’une Europe socialiste.

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