La démocratisation d’internet a permis à des familles modestes d’avoir accès à une quantité pratiquement illimitée de films et de musique, via le téléchargement. Dans ce domaine, elle a donc un peu réduit les inégalités entre les riches et les pauvres. Internet offre également la possibilité à des artistes indépendants de contourner les canaux traditionnels (réservés à une petite minorité d’artistes) pour diffuser leurs œuvres et se faire connaître.
Cette évolution technologique majeure est entrée en conflit avec les intérêts d’une poignée de capitalistes qui contrôlent l’essentiel du marché de la diffusion de films et de musique. Nous sommes face à une illustration limpide de ce qu’expliquait Karl Marx : à un certain stade, le développement de la technologie entre en conflit avec les rapports de production et d’échange capitalistes. Les capitalistes veulent tout soumettre à la loi du profit. Ils ne tolèrent pas que des gens puissent massivement consommer des œuvres culturelles sans payer – et donc sans générer du profit. A leurs yeux, l’art est d’abord unemarchandise, au même titre qu’une boite de raviolis.
On connaît la suite. Après s’être assuré du soutien de 52 « grands artistes », le gouvernement a organisé une grande campagne de propagande pour expliquer que le téléchargement gratuit est une grave menace pour la culture. Puis ils ont pris des mesures contre le « piratage » (le téléchargement gratuit). En vigueur depuis octobre 2010, la loi HADOPI surveille une centaine de fichiers sur les réseaux de partage de « pair-à-pair » (peer to peer). Contre les « pirates d’internet », l’arsenal technique et juridique de cette loi va d’un e-mail d’avertissement jusqu’à la coupure d’accès internet et l’amende.
Les communistes dénoncent cette attaque contre nos libertés démocratiques. C’est une loi taillée pour les intérêts des actionnaires de Vivendi Universal, Warner et autres grands groupes du secteur. Ces gens sélectionnent la production et la diffusion d’œuvres selon des critères purement commerciaux – qui ne favorisent pas la création et la nouveauté. Ils ont travesti le métier de musicien en faisant de la scène un simple support promotionnel pour la vente de disques. Grâce à ce business, une toute petite minorité d’artistes ont accumulé des fortunes colossales. Pendant ce temps, d’innombrables talents luttent au quotidien pour se faire connaître ou vivre de leur art.
Pour justifier HADOPI, les politiciens de droite ont versé des larmes de crocodile sur la « rémunération des artistes ». Mais ce sont les mêmes qui, en 2003, attaquaient brutalement le statut des intermittents du spectacle ! L’écrasante majorité des artistes ne demandent pas de vivre comme ces stars que la presse people paye grassement pour étaler leurs extravagances sur du papier glacé. Non : ils demandent l’accès à des salles, des studios d’enregistrement et d’autres moyens logistiques. Quant à ceux qui trouvent un public et souhaitent se consacrer à plein temps à leur art, ils demandent simplement de quoi en vivre dignement.