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Début septembre, le Premier ministre conservateur britannique, Boris Johnson, annonçait la suspension du Parlement. Ce faisant, il cherchait à empêcher les députés de repousser le Brexit au-delà du 31 octobre (avec ou sans accord avec l’UE). Cette annonce a plongé le pays dans sa pire crise constitutionnelle depuis… la fermeture du Parlement par Cromwell, en 1653 !

Fin septembre, la Cour Suprême a invalidé la décision de Johnson. Le Parlement n’est plus suspendu, mais l’impasse politique demeure. Des élections législatives anticipées sont donc inévitables, à court terme.

La Conférence du Labour

Le Parti travailliste (Labour) – dirigé par Jeremy Corbyn, qui vient de l’aile gauche du parti – pourrait bien gagner ces élections. C’est du moins la conviction qui animait la récente Conférence du Labour.

Cette Conférence a été marquée par la radicalité et l’enthousiasme de la grande majorité des délégués. En témoigne le débat sur la restauration de la « clause IV » dans les statuts du parti. Cette clause y avait été inscrite en 1918, sous l’impact de la révolution russe de 1917. Elle revendiquait pour les travailleurs « les fruits de leur industrie » grâce à « la propriété commune des moyens de production, de distribution et d’échanges ». Elle fixait au parti un objectif socialiste et révolutionnaire. Elle a été supprimée en 1994 par Tony Blair, alors chef du parti travailliste.

Ces huit derniers mois, nos camarades de Socialist Appeal, section britannique de la TMI, ont fait campagne en faveur de la clause IV – avec un énorme succès. Lors de la Conférence, 62 % des délégués issus de la base ont voté pour la clause IV.

Le ton était donné pour le reste de la semaine. Jour après jour, des interventions radicales – contre l’austérité, pour le socialisme – se succédaient. Parmi les propositions programmatiques votées figurent la semaine de travail de 32 heures, la fin du système des écoles privées, la création d’une authentique Sécurité sociale, ainsi qu’un « New Deal Vert » reposant sur un vaste plan de nationalisations.

Le Brexit et les « blairistes »

Les délégués ont également rejeté une motion présentée par la droite du parti, qui demandait qu’il fasse campagne pour le « remain » (rester dans l’UE). Corbyn a répliqué que le Labour ne devait être « ni le parti des 52 %, ni celui des 48 % » (en référence au résultat du référendum sur le Brexit), mais « celui des 99 % ». Il a indiqué qu’un gouvernement travailliste « s’attaquerait à ceux qui dirigent vraiment le pays : les spéculateurs financiers, les fraudeurs fiscaux et les gros pollueurs ». Il est clair que le Labour doit faire campagne sur une ligne de classe, seul moyen de rassembler les travailleurs au-delà du faux clivage « pour » ou « contre » le Brexit.

Corbyn sort renforcé de la Conférence. La base du parti s’est ralliée derrière lui. Quant aux « blairistes » (l’aile droite), ils en sortent complètement marginalisés. Tom Watson, leur chef de file, a même annulé son discours – faute de public !

Ceci dit, l’aile droite du Labour, qui compte beaucoup de députés, représente toujours un danger. La bourgeoisie britannique tente de jeter les bases d’un gouvernement « d’union des modérés » (du Labour et des Conservateurs) pour empêcher Corbyn de prendre le pouvoir. Des « blairistes » soutiennent cette manœuvre. Corbyn doit être ferme : les députés qui refusent de défendre le programme adopté par la Conférence ne doivent pas être investis candidats du Labour aux prochaines élections.

Vers des élections

S’estimant « favori » des prochaines élections, Boris Johnson a déclaré fin septembre : « la chose évidente à faire est d’organiser des élections. Jeremy Corbyn parle à tort et à travers, mais il devrait demander des élections ». Le dirigeant travailliste l’a pris au mot en déclarant, à la Conférence, que la crise institutionnelle ne pouvait être dénouée que par des élections générales. Les militants ont accueilli cette déclaration avec beaucoup d’enthousiasme. Ils sont déterminés à mener une campagne électorale offensive sur la base du programme adopté par la Conférence.

En 2017, la Première ministre conservatrice Theresa May avait déjà convoqué des élections anticipées. Se fiant aux sondages, qui lui donnaient 20 points d’avance, elle pensait pouvoir conforter sa majorité. Il n’en fut rien. Jeremy Corbyn a fait campagne sur un programme assez radical et a recueilli 40 % des suffrages, contre 42 % pour les Conservateurs. Depuis, l’humeur des masses n’a cessé de se radicaliser. Sur la base de la plateforme audacieuse votée à la Conférence, le parti travailliste pourrait bien l’emporter, cette fois-ci.

Une fois Corbyn au pouvoir, nos camarades de Socialist Appeal poursuivront leur campagne pour que soit mis en œuvre le contenu révolutionnaire de la clause IV : « la propriété commune des moyens de production, de distribution et d’échanges ».

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