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Ripostons face au fascisme

Le meurtre de Clément Méric devrait attirer l’attention de tous les militants du mouvement ouvrier sur les agissements des groupements fascistes, dont l’activité a gagné en intensité au cours de la dernière période. Les agressions à l’encontre de militants de gauche, de citoyens « étrangers » ou d’homosexuels se sont multipliées, notamment à Lyon, Lille, Toulouse et Paris. La question du fascisme doit être prise très au sérieux. S’il est vrai que les différentes organisations de type fasciste ne sont pas très importantes, numériquement, elles sont actives et très agressives. Si nous leur permettons de poursuivre leur violence réactionnaire, Clément Méric ne sera pas la dernière victime de la racaille d’extrême droite. Il faut tuer ces organisations dans l’œuf.

Le capitalisme a mené la société dans une impasse. Comme nous l’avons expliqué à maintes reprises, la crise actuelle est qualitativement différente de toutes celles que nous avons connues depuis 1945. Tant que le capitalisme existera, la régression sociale se poursuivra et s’aggravera. La débâcle économique est en train de broyer des millions de vies. La France entrera prochainement dans une période de grande instabilité sociale et politique, au cours de laquelle les esprits se radicaliseront vers la gauche, vers les idées révolutionnaires, mais aussi vers la droite et l’extrême droite, vers les idées racistes et fascistes. Le point de vue de nos paisibles réformistes, pour qui la résolution des contradictions sociales passe par des débats parlementaires, ne repose sur aucune réalité. Au contraire : les problèmes qui se posent sont d’une gravité telle qu’ils ne pourront être résolus qu’au moyen de conflits de classe se déroulant en dehors des fameuses « institutions républicaines » et en opposition à celles-ci. Aucun gouvernement de gauche ne pourra offrir une issue s’il ne se place pas à la tête d’un mouvement visant à renverser l’ordre établi.

Hollande est un vendu. Son horizon politique est limité par le système capitaliste, qui pour lui est sacré. Il existe un lien direct entre la recrudescence des idées d’extrême droite et la mollesse lâche et capitularde de ces « socialistes » confortablement installés dans les niches fort bien rémunérées de la république capitaliste. Ils bloquent le chemin au changement, protègent l’ordre établi, tandis que la mécanique infernale du capitalisme, remuant la société jusqu’aux bas-fonds, fait remonter à la surface une certaine quantité de petit-bourgeois et autres d’éléments « déclassés » qui s’unissent dans la nostalgie du nazisme et la haine des révolutionnaires.

Marine Le Pen veut donner l’impression de n’avoir plus de liens avec cette racaille. Le Front National aurait « fait le ménage ». Mais ce ne sont que des nuances. Le Pen alimente sciemment la haine raciale et alimente, du coup, les rangs des organisations qui veulent mettre en pratique ses idées réactionnaires et racistes. Les fascistes veulent se déchaîner contre les « immigrés », contre les homosexuels, contre des militants de gauche. Le Pen leur ouvre la voie, tout en prenant ses « distances ».

La direction du PCF a évidemment condamné l’agression qui a causé la mort de Clément Méric [1]. Elle demande à l’Etat de dissoudre les organisations fascistes. Les différents communiqués du parti – aux niveaux national et fédéral – adoptent un ton « républicain » sentencieux. Le communiqué de la fédération parisienne, par exemple, déclare que l’agression « appelle une réponse forte et immédiate de l’État. La République ne peut tolérer le développement de ces groupuscules dont le sentiment d’impunité ne cesse de progresser. Ils doivent être dissous et les idées de haine qu’ils portent doivent être combattues ». C’est une approche qui n’est pas à la hauteur des enjeux. La République ne peut tolérer les groupes fascistes ? Et pourquoi donc ? Elle s’accommode parfaitement de l’exploitation capitaliste. Ses lois justifient et perpétue cette exploitation, ainsi que de toutes les souffrances et oppressions qui en découlent. Elle peut « tolérer » 5 millions de chômeurs. Elle peut tolérer ses propres lois discriminatoires et racistes. Elle criminalise le syndicalisme et organise la violence policière contre des manifestants. Et c’est cette même république qui nous protègerait contre les fascistes ?

Une république capitaliste qui incarnerait l’égalité, qui serait une sorte de rempart contre l’injustice, n’est qu’une pure et simple idéalisation. Le PCF ne devrait pas se prêter à cette mystification. Il devrait au contraire s’efforcer de lever le voile sur le mythe républicain capitaliste et expliquer la brutalité des rapports de classe sur lesquels cette république repose. Même si les organisations fascistes étaient dissoutes, elles renaîtraient sous une autre forme. On ne parviendra pas à les éliminer par des mesures administratives, car leurs racines plongent dans toute la crasse matérielle et morale que la crise du capitalisme dépose dans les profondeurs de la société.

Demander à l’Etat et à la république capitalistes d’éradiquer les organisations fascistes, ce n’est pas seulement illusoire : c’est potentiellement dangereux. Par le passé, lorsque des gouvernements bourgeois portaient un coup contre les fascistes (tout en les ménageant), ils en profitaient pour en porter dix contre les révolutionnaires ouvriers, sous couvert d’« arbitrer » le conflit entre les deux camps. Certes, la situation actuelle n’est pas comparable à l’Italie ou l’Allemagne pré-fascistes, loin de là. Mais notons que le président de l’UMP, Jean-François Copé, a demandé publiquement au gouvernement de dissoudre non seulement les organisations fascistes (avec lesquelles il manifestait récemment), mais aussi les organisations d’« extrême gauche ».

Au lieu de s’en remettre à la bienveillance supposée de la république, le PCF et l’ensemble du mouvement ouvrier doivent adopter une politique indépendante, une politique de classe, pour en finir avec le fascisme. Pour commencer, dans les sections du PCF, du PG, du PS, de la CGT et de l’ensemble des organisations syndicales, nous devons faire comprendre à tous les militants ce qu’est le fascisme et pourquoi il faut l’éradiquer. Il faut créer des comités pour surveiller les agissements des organisations fascistes et en informer tous les militants. Chaque manifestation publique de ces organisations devrait être dispersée par une contre-manifestation. Il faut répondre à toute provocation fasciste en mobilisant la pleine puissance de la classe ouvrière organisée. Le mouvement ouvrier français est très puissant. Il doit utiliser cette force pour donner une leçon aux fascistes.

En même temps, la réponse à la recrudescence des mouvements fascistes, au nationalisme et au racisme, ne saurait se réduire à la vigilance et aux seules « mobilisations ». C’est avant tout une lutte politique. Le Parti Socialiste se raccroche au système capitaliste. Ses dirigeants – fidèles aux « valeurs républicaines » bourgeoises – se sont complètement intégrés au système capitaliste. Ils en sont les agents conscients au sein de la gauche. Au PCF, la base militante n’est pas encore parvenue à s’affranchir de la modération réformiste des dirigeants, qui n’osent pas porter atteinte à la propriété privée des banques et des grandes entreprises. Le communisme « réinventé » dont ces derniers se réclament n’est rien d’autre que du réformisme, c’est-à-dire la recherche de solutions sur la base du capitalisme aux problèmes créés par ce même système. Or, si les travailleurs, les couches intermédiaires de la société et la masse grandissante de gens vivant dans la misère et la précarité ne trouvent pas, dans notre camp, une alternative sérieuse au capitalisme, cela favorisera l’implantation du Front National et des mouvements fascistes. La lutte contre ces derniers est donc indissociable d’un renforcement des idées et du programme des grandes organisations du mouvement ouvrier, à commencer par le PCF et la CGT.


[1Mort de Clément Méric : « La haine et la violence fasciste doivent être combattues sans relâche » (Pierre Laurent)

 

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