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Burkina Faso

Le régiment de sécurité présidentiel (RSP) du Burkina Faso a réalisé un coup d’État le 17 septembre dernier. Une semaine plus tard, le général Gilbert Dendiéré, à la tête des putschistes, a dû renoncer au pouvoir. Il s’agissait d’une tentative désespérée d’en revenir à « l’ancien régime ». Le RSP est une milice d’élite liée au président déchu Blaise Compaoré. Après 27 années de pouvoir au service des impérialistes et de la bourgeoisie locale, Compaoré a été renversé par une insurrection de masse en octobre 2014. Le gouvernement « de transition » dirigé par un militaire, Isaac Zida, a reçu l’appui des impérialistes. Mais il s’est révélé d’une faiblesse et d’une instabilité chroniques.

La tentative du RSP de profiter de cette instabilité a échoué. Les troupes régulières sont restées loyales au gouvernement de Zida. Ceci dit, les troupes loyalistes ont tardé à réagir. Le facteur essentiel qui les y a poussées, finalement, se trouvait ailleurs que dans les casernes : tout le pays s’est soulevé dès l’annonce du coup d’État. Les syndicats de travailleurs ont immédiatement organisé une grève générale. Dans les villages, les communautés paysannes ont pris des armes de fortune et organisé une forme de guérilla. Les putschistes étaient complètement isolés.

Effervescence révolutionnaire

Depuis le renversement révolutionnaire de Compaoré, les masses du « Pays des Hommes Intègres » ont fait irruption dans l’arène de l’Histoire. Leurs colères et frustrations, accumulées pendant des décennies, se sont libérées. Elles exercent une pression constante sur tout pouvoir en place. Et c’est cette pression qui explique l’instabilité et les crises du gouvernement de transition.

Ces 12 derniers mois, les grèves et les manifestations de travailleurs, d'étudiants et de pauvres se sont multipliées. A travers le pays, des révoltes spontanées ont éclaté sur des questions clés comme la propriété de la terre, les relocalisations forcées de population, la corruption, les conflits fonciers, les conflits miniers et l’état des équipements publics.

Les tensions les plus vives concernent l’industrie minière de l’or. C’est la première ressource exportée par le pays (1,4 milliard d’euros par an). Mais le boom minier n’a pas contribué au développement local. D’autres secteurs de l’économie sont au cœur de la révolte : les transports, le tourisme ou l’industrie paysanne du coton. Encouragés par le soulèvement populaire d’octobre 2014, les villageois et les travailleurs sont passés à l’action pour améliorer leurs conditions vies.

« Le Balai citoyen » et l’héritage sankariste

En octobre 2014, une organisation militante récente – Le Balais citoyen – avait joué un rôle clé dans la mobilisation insurrectionnelle de la jeunesse. Mais après la chute de Compaoré, les dirigeants du Balai citoyen ont appelé à cesser la mobilisation, alors que le pouvoir était entre les mains des masses. Cela a permis au régime – dont Zida faisait partie – de retomber sur ses pieds. En septembre dernier, les masses auraient pu prendre le pouvoir, de nouveau. Mais elles n’avaient toujours pas de direction révolutionnaire.

Ceci dit, le « Balai citoyen » reflète les pressions des masses. Il revendique l’héritage de Thomas Sankara, président du pays entre 1983 et 1987. Ce dernier nationalisa les mines et mena une réforme agraire. Il réalisa le programme le plus révolutionnaire de l’histoire du continent africain. Il parlait d’étendre la révolution au reste de l’Afrique. Cela en fit l’ennemi public n°1 des élites dirigeantes du continent et de leurs maîtres impérialistes. Il fut assassiné en 1987 par les hommes de Blaise Compaoré, avec le soutien direct du gouvernement français.

Sankara disait : « On peut tuer un homme, mais on ne peut pas tuer ses idées ». Les idées de Sankara et l’expérience révolutionnaire du Burkina suscitent la sympathie de la jeunesse dans toute l’Afrique. Des mouvements semblables au Balai citoyen commencent à émerger au Sénégal (« Y en a marre »), mais aussi au Zimbabwe et au Congo-Kinshasa.

La France maintient le Burkina sous sa coupe depuis son « indépendance », en 1960, via sa présence militaire, ses multinationales et le Franc CFA. Les impérialistes français ont offert un exil doré à Compaoré – tout en cherchant à consolider le nouveau pouvoir. Mais ils ne contrôlent plus les événements.

Zida lui-même cherche à calmer les masses. Des élections présidentielles devaient se dérouler en octobre, sanctionnant la mise à l’écart définitive du RSP de tout le processus électoral. Le putsch manqué a repoussé l’échéance au 29 novembre. Quoiqu’il arrive, aucun parti bourgeois ne pourra résoudre les problèmes des Burkinabés. Du mouvement de la jeunesse et des travailleurs doit émerger une direction qui, prolongeant l’héritage de Sankara, mettra à l’ordre du jour la lutte de toute l’Afrique pour le socialisme. Cela passe par le renversement des valets régionaux de l’impérialisme, qu’ils aient l’étiquette de dictateurs ou de « démocrates ».

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