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François Fillon

Dès l’annonce de la très large victoire de la gauche, aux élections régionales, les ministres présents sur les plateaux de télévision ont tous répété le même refrain, appris par cœur sous la dictée de Sarkozy et de ses conseillers. « La gauche a gagné ». On l’avait bien compris. Pourquoi a-t-elle gagné ? « Parce que la crise économique frappe durement les Français. Ils nous demandent d’agir et de régler leurs problèmes. Et c’est ce que nous allons faire, en poursuivant les réformes. »

C’est donc « la crise » qui expliquerait la victoire de la gauche. En un sens, c’est indiscutable. Mais les ministres oublient de rappeler qu’ils sont eux-mêmes responsables de cette crise. Pendant des années, ils ont mis en œuvre ou justifié les politiques de spéculation, de « dérégulation » et d’endettement massif qui ont précipité la récession. Ils oublient également de rappeler que depuis le début de cette crise, la politique du gouvernement Sarkozy en a aggravé les effets dévastateurs – pour le plus grand nombre, du moins, car une petite minorité richissime s’en sort très bien.

Ainsi, les artisans du désastre se présentent à nous comme ceux par qui viendra le salut. Cette posture grotesque ne convaincra pas grand monde. Mais Sarkozy et les dirigeants de l’UMP n’ont pas le choix. Ce gouvernement travaille au service et pour les intérêts exclusifs de la poignée de parasites qui contrôle les principaux leviers de l’économie. Or, les intérêts de la classe dirigeante exigent des coupes budgétaires et des contre-réformes drastiques. Sarkozy et sa clique défendront ces intérêts coûte que coûte. C’est le principal message des responsables de l’UMP : « Votez comme il vous plaira, nous poursuivrons notre politique de destruction des services publics et des acquis sociaux ». Pour tenter de résorber la dette publique, qui s’est envolée à plus de 80% du PIB, le gouvernement ne s’attaquera pas aux plus riches, mais à la masse de la population. Dans le même temps, il intensifiera sa campagne de propagande raciste et « sécuritaire ». Par exemple, le Parlement sera rapidement saisi d’un projet de loi visant à interdire le port de la burqa. Les députés communistes doivent voter contre cette loi – et dénoncer haut et fort cette tentative flagrante de diviser la classe ouvrière.

Les conclusions qui en découlent, pour le mouvement ouvrier, sont très claires : seule une vaste offensive extra-parlementaire du salariat peut faire obstacle aux contre-réformes que prépare le gouvernement Sarkozy, à commencer par une nouvelle casse des retraites. Plus précisément, seul un grand mouvement de grève généralisé peut faire échec à la droite au pouvoir. Demain, 23 mars, une journée d’action interprofessionnelle est organisée, dans tout le pays. La lourde défaite de la droite pourrait encourager la mobilisation, dans la rue. Mais même si elle est massivement suivie, une nouvelle « journée d’action » sans lendemain n’aura aucun effet sur la politique du gouvernement. Du point de vue de la stratégie syndicale, la journée du 23 mars doit être le point de départ d’une campagne pour expliquer la nécessité d’un mouvement de grève général et illimité.

Les travailleurs des raffineries de Total nous ont montré la voie. En quelques jours de grève, ils ont jeté le gouvernement et la direction de Total sur la défensive. Certes, ils n’ont pas encore gagné. Une fois la grève suspendue, les dirigeants de Total ont repris l’offensive. Mais les salariés de cette entreprise ont tout de même donné une leçon très précieuse à tous les travailleurs du pays. Ils ont rappelé que les salariés font tout, dans la société, et peuvent donc tout arrêter. Leur puissance potentielle est colossale. Il n’y a pas de force plus puissante que la classe ouvrière en mouvement.

Encore faut-il que travailleurs en aient conscience. Normalement, c’est aux dirigeants de la gauche et du mouvement syndical d’aiguiser cette conscience et de renforcer la confiance des salariés en leurs propres forces. Or, dimanche soir, les dirigeants socialistes n’ont même pas évoqué la mobilisation du 23 mars. A 48 heures de cette grande journée d’action syndicale, Martine Aubry aurait pu et dû appeler la jeunesse et les salariés à se mobiliser massivement. Elle a demandé à Sarkozy de « changer profondément de politique », mais sans indiquer aux salariés par quels moyens le mouvement ouvrier pourrait contraindre Sarkozy à renoncer à ses attaques. Ce faisant, Martine Aubry a raté une occasion de mettre en pratique ses engagements à « renouer avec le mouvement social », lors du dernier Congrès du Parti Socialiste.

Ce matin, le PCF appelle à participer à la mobilisation du 23 mars. La Riposte se joint à cet appel. L’exaspération de millions de jeunes et de travailleurs doit trouver le chemin des luttes. Face à la crise du capitalisme et aux attaques redoublées de la droite au pouvoir, il n’y a pas d’autre issue que la lutte collective.

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