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La « dictature du prolétariat » est une idée marxiste très critiquée. Après la mort de Marx et Engels, d’innombrables « révisionnistes » – qui révisaient le marxisme dans le sens du réformisme – ont rejeté cette idée. De nos jours, le « marxiste » Lucien Sève affirme que cette formule est une erreur de Marx dont les conséquences ont été « désastreuses » pour le mouvement communiste. Les anticommunistes déclarés font plus simple : ils s’appuient sur le mot « dictature » pour « prouver » que le marxisme est anti-démocratique – et que les crimes du stalinisme étaient en germe dans la notion de dictature du prolétariat.

Une phase de transition

En réalité, la « dictature du prolétariat » n’est ni le germe du stalinisme, ni une erreur de Marx dont Lénine et Trotsky auraient fait un usage abusif. Même si Marx et Engels ont peu utilisé cette formule, elle occupe une place importante dans leur théorie.

Dans sa Critique du programme de Gotha (1875), Marx écrivait : « Entre la société capitaliste et la société communiste se place la période de transformation révolutionnaire de celle-là en celle-ci. A quoi correspond une période de transition politique, où l’Etat ne saurait être autre chose que la dictature révolutionnaire du prolétariat. » Ainsi, la dictature du prolétariat désigne cette « période de transition » au cours de laquelle les travailleurs – la majorité de la société – imposent aux anciennes classes dirigeantes (la minorité) des mesures permettant d’avancer vers le communisme. La « dictature du prolétariat », c’est donc la démocratie ouvrière.

Aujourd’hui, après un XXe siècle marqué par tant de régimes tyranniques (dont les régimes staliniens, qui se réclamaient du marxisme), le mot de « dictature » n’a plus les mêmes connotations qu’à l’époque de Marx et Engels. Ils utilisaient le mot « dictature » en référence à la République romaine, où la « dictature » désignait cette phase temporaire pendant laquelle un individu est doté des pleins pouvoirs pour régler une crise grave. Ainsi, la dictature du prolétariat désigne cette phase au cours de laquelle la classe ouvrière concentre le pouvoir politique entre ses mains, après l’avoir arraché à la bourgeoisie. Une fois cette phase achevée, il n’y a plus de dictature puisqu’il n’y a plus de classes sociales – et donc plus de pouvoir politique en général. L’Etat ouvrier s’éteint. Comme l’écrivait Engels : « le gouvernement des personnes fait place à l’administration des choses et à la direction des opérations de production ». C’est le communisme.

La Commune de Paris

Dans son contenu, la démocratie ouvrière – la dictature du prolétariat – n’a rien à voir avec le stalinisme ou les dictatures bourgeoises. Après la Commune de Paris (1871), Engels soulignait qu’elle fut le premier exemple de dictature du prolétariat. Dans leurs efforts pour remplacer l’Etat bourgeois par un Etat ouvrier, les communards ont pris des mesures démocratiques inédites : 1) responsabilité et révocabilité de tous les élus ; 2) pas d’élus et de fonctionnaires mieux payés qu’un ouvrier qualifié ; 3) pas d’armée permanente et séparée du peuple, mais le peuple en arme.

La dictature du prolétariat, c’est cela, et rien d’autre.

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